Rencontre avec Michael Molinari

Michael Molinari est professeur au sein du Laboratoire de Recherche en Nanosciences (LRN – EA 4682) et lauréat de la bourse Fulbright Grand Est avec son projet intitulé « Use of Nanoparticles as an alternative strategy to pesticides for vineyard diseases ».

Pouvez-vous nous présenter votre parcours et vos thématiques de recherche ?

Après avoir fait mon doctorat à l’Université de Nancy, je suis parti aux États-Unis pour faire un postdoctorat à l’Université de Rochester (NY). En 2004, j’ai intégré l’URCA en tant que maître de conférences dans le domaine de la microscopie champs proche et des propriétés optiques des nanostructures. Je suis ensuite passé professeur des universités en 2011 et je développe actuellement des thématiques aux interfaces Physique/chimie/biologie.

Vous venez de vous voir attribuer une bourse Fulbright, pouvez-vous nous présenter comment vous en êtes venus à déposer ce projet?

J’ai fait la connaissance de Laurène Tétard, professeur associée de l’Université de Floride Centrale (UCF) lors d’une conférence aux États-Unis à laquelle j’avais été invité. Après avoir discuté de nos thématiques communes dans le domaine de la microscopie et des applications dans le domaine du végétal (nanocaractérisation de fibres et de polymères végétaux), nous avons décidé de lancer une thèse en co-direction entre son laboratoire et le LRN associé à l’UMR INRA FARE côté URCA.

Dans le même temps, l’UCF étant fortement impliquée dans des thématiques liées à l’utilisation de nanoparticules et de matériaux associés pour des problématiques environnementales, le NanoScience Technology Center de l’UCF a obtenu le financement et la labellisation d’un centre d’excellence appelé MISA (Materials Innovation for Sustainable Agriculture), reconnu par l’Institut national pour l’agroalimentaire (NIFA) du département d’agriculture du gouvernement des États-Unis (USDA). Un des projets phare du centre MISA concerne le remplacement des bactéricides et pesticides utilisés en Floride pour le traitement des maladies des agrumes par des nanoparticules non toxiques.

Au vu des thématiques assez proches pour les deux universités dans le domaine des nanosciences, j’ai fait un premier séjour de deux semaines en juin 2016 à l’UCF pour voir les points de rapprochement possibles. Suite à plusieurs discussions que j’avais eues en amont et à la rencontre avec le Pr S. Santra, directeur du centre MISA, il est apparu qu’il serait intéressant d’étendre la collaboration avec d’autres laboratoires de l’URCA tels que l’URVVC, FARE et l’ICMR par exemple pour mener des études plus générales comme l’utilisation des nanoparticules utilisées à l’UCF pour le traitement des maladies de la vigne ou le couplage des stratégies développées à l’URVVC aux nanoparticules pour améliorer les traitements.

Nos collègues américains se sont alors déplacés à Reims à l’Automne 2016 pour discuter sur place de la faisabilité d’un tel projet. Ce projet semblant très intéressant pour les deux communautés et afin d’acquérir le savoir-faire développé à l’UCF, j’ai alors envisagé de monter un projet de mobilité à l’UCF.

Dans les dispositifs existants, deux semblaient pouvoir financer une telle mobilité, les bourses individuelles de mobilité Marie Curie et les bourses Fulbright franco-américaines, les deux dispositifs étant aussi sélectifs.

Au vu des attendus et des critères de sélection, l’appel Fulbright finançant normalement des mobilités jusqu’à 6 mois paraissait le plus adapté à mon profil d’autant plus que la région Grand Est a étendu aux 3 ex-régions le dispositif spécifique Alsace permettant de prolonger la mobilité jusqu’à 12 mois.

Vous avez également travaillé sur un projet de bourse individuelle Marie Curie, quelles sont les particularités de ces deux dispositifs ? En quoi diffèrent-ils ?

Sur le papier, les deux dispositifs sont différents particulièrement sur les attendus et les retombées du projet.

La bourse individuelle de mobilité Marie Curie est vraiment liée à la carrière de la personne partant en mobilité. La mobilité peut se faire dans n’importe quel pays (y compris les USA) pour des périodes pouvant aller jusqu’à 2 ans.

Le projet est purement individuel et il faut montrer quel sera son impact sur la carrière du chercheur et son université de base lorsqu’il reviendra de la mobilité. Il semble ressortir de l’appel que ce projet est plus à destination des jeunes chercheurs / jeunes chercheuses pour gagner en compétences lors de leur séjour. Les retombées sur la carrière sont un point semblant important dans la notation finale du projet. Pour mener à bien le projet, il faut un garant dans son université et dans l’université d’accueil. Comme dans les autres projets européens, les rubriques « valorisation », « lien avec le grand public » … sont également importantes dans l’écriture du projet, la partie purement scientifique représentant une partie assez légère du projet « écrit » (3 pages). Il n’est pas forcément attendu le développement de relation entre les deux universités à la fin du projet.

Les critères d’évaluation sont bien connus avec des notes sur chaque rubrique amenant à une sélection finale basée uniquement sur l’expertise du projet.

Au niveau financier, la bourse Marie Curie est plus intéressante dans la mesure où elle comprend en plus d’une bourse mensuelle pour le chercheur une somme pour couvrir certains frais liés aux activités de recherche de l’institution d’accueil et pour l’installation des familles[1]. La mobilité peut durer jusqu’à deux ans et le financement est maintenu pendant la phase de retour en France.

L’appel Franco-américain est différent dans la forme et dans le fond. Sur le fond, l’aspect développement des relations entre les deux universités impliquées et leurs complémentarités est extrêmement important dans les différentes rubriques. La période de mobilité est normalement de 6 mois mais grâce au dispositif spécifique Fulbright Grand Est, elle peut être étendue jusqu’à un an. Le processus de sélection est différent et se passe en 2 phases avec la rédaction initiale d’un projet puis si le projet est sélectionné, une 2ème phase avec un entretien oral à la Commission franco-américaine Fulbright, à Paris pour vérifier la pertinence du projet et la motivation des candidats.

L’aspect scientifique est plus développé dans le dossier à rendre (projet scientifique de 15 pages) qui sera évalué par discipline et en fonction de la cohérence avec les thématiques prioritaires des échanges franco-américains. Il faut avant tout montrer les apports et les bénéfices des deux côtés. Pour l’entretien oral (en anglais), les questions portent à la fois sur l’aspect scientifique mais également sur la préparation de la mobilité.

Au niveau financier, un billet d’avion aller-retour est financé ainsi qu’une bourse prenant en charge le séjour aux Etats-Unis. Pour la bourse Fulbright. L’avantage pour les Etats-Unis est que la commission se charge de la procédure de visa (assez lourde) et d’une assurance santé pour la personne en mobilité.

Avez-vous des conseils pour des chercheurs souhaitant postuler sur un appel Fulbright ?

Il faut porter une grande attention aux 3 lettres de soutien que l’on fournit avec la candidature, mieux vaut en avoir côté français et côté américain. J’ai également pris contact avec des lauréats des années précédentes afin de pouvoir me préparer à l’entretien oral. Enfin, je conseillerais de mettre l’accent sur les apports bilatéraux et d’avoir un projet scientifique solide et poussé.

Quelles suites envisagez-vous pour votre projet ?

Il y a tout d’abord un Memorandum of Understanding (MOU) qui va être signé entre l’URCA et l’UCF et qui devrait permettre d’étendre nos collaborations aux échanges d’étudiants, à d’autres cotutelles de thèse et au développement du projet scientifique global. Ensuite, nous souhaiterions déposer un projet PIRE franco-américain, financé par l’ANR et la NSF avec à la fois un volet recherche et un volet formation.

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[1] Pour le/la boursier/ère : Montant mensuel - Living allowance + mobility allowance + Family allowance

Pour l’institution d’accueil : Montant mensuel – Coûts de recherche, formation et de réseau + coûts indirects