Rencontre avec Nathalie Trannoy

Le Zoom du mois de mai propose des rencontres avec des enseignants-chercheurs de l'URCA qui travaillent également en tant qu'experts évaluateurs pour la Commission européenne.

Nathalie Trannoy est chercheuse au sein du laboratoire GRESPI (Groupe de Recherche en Sciences pour l'Ingénieur) et elle est actuellement experte pour le monitoring d'un projet TIC "Nanotechnologies et Nanosciences" du 7ème PCRD.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

J’ai d’abord été ingénieure de recherche en entreprise, puis j’ai effectué un doctorat en physique à l’Université de Reims où je suis en poste depuis 1999. Je suis devenue Professeure des Universités en 2014. Je travaille dans le domaine de la microscopie thermique à sonde locale, c’est-à-dire l’étude des transferts de chaleur dans les matériaux de petites dimensions et dans les micro/nanocomposants et, plus précisément, sur les méthodes de caractérisation thermique aux micro/nano échelles.

Comment êtes-vous devenu expert évaluateur et pour quel type de projet ?

J’ai été contactée par la Commission européenne pour intervenir sur un projet qui correspondait exactement à mon domaine, je n’ai pas eu à m’inscrire sur une plateforme. Je suis experte sur ce projet depuis trois ans et seulement sur celui-ci.

En quoi consiste le travail d’un expert évaluateur ?

Je dois vérifier le bon avancement du projet à l’occasion de l’expertise (« review ») annuelle obligatoire pour les projets européens de recherche. Les membres du consortium présentent aux experts et au Project Officer de la Commission européenne leurs résultats sur chaque Work Package ainsi que le temps et l’argent investi et ils doivent justifier de toute différence avec ce qui était prévu dans le document de travail correspondant au projet déposé détaillé.

En général, je suis contactée un ou deux mois avant la review pour donner mes disponibilités et organiser le voyage sur le lieu de la rencontre. Une dizaine de jour avant la rencontre, je reçois les rapports et je dois reprendre tous les éléments du projet, m’assurer de l’avancement du projet et vérifier si les délivrables sont corrects et complets. Ensuite, lors de la review, nous sommes deux experts, généralement un académique et un industriel, et nous posons des questions et demandons des précisions aux membres du consortium qui doivent justifier des éventuels retards ou non réalisation des activités liées au projet.

Cependant c’est le rôle du Project Officer d’exiger plus de résultats ou de demander des comptes s’il l’estime nécessaire. Il représente la Commission européenne et est chargé de surveiller la bonne utilisation des fonds européens.

Qu’est-ce que ce travail vous a apporté ?

C’est très intéressant et enrichissant, on comprend mieux la logique de la Commission européenne, pourquoi elle impose un suivi si strict des projets. Il est important pour elle de s’assurer de l’implication de tous les partenaires et également que les résultats scientifiques donnent lieu à des dépôts de brevets, à des publications. Par conséquent, c’est utile pour le projet européen auxquels je participe en tant que chercheure.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières ?

J’ai rencontré quelques difficultés au départ, notamment sur des aspects non scientifiques. Par exemple, je n’étais pas capable d’évaluer si le nombre d’hommes/mois sur une activité était crédible et approprié. Mon collègue expert avait un peu plus d’expérience dans ce domaine. D’un commun accord, il a donc pris cette partie en charge afin de poser les bonnes questions.

De plus, lorsqu’un projet à expertiser nous est envoyé c’est une charge de travail soudaine. Il faut donc pouvoir se libérer du temps pour étudier les dossiers et pour faire le déplacement lors du jour de la review.

Avez-vous des conseils pour un chercheur souhaitant devenir expert ?

C’est certes une expérience très enrichissante mais ça demande de l’investissement et du temps. Etant donné que les projets sont très spécifiques, je pense qu’il vaut mieux rester sur son domaine d’expertise et ne pas en évaluer plusieurs à la fois. Il faut noter que les reviews peuvent être différentes d’un projet à l’autre mais les grands principes restent les mêmes : La recherche donne-t-elle des résultats ? L’argent est-il bien utilisé ? Ces résultats sont-ils publiés ou bien brevetés ou brevetables? Il faut qu’il y ait des retombées pour l’Europe.