L'atmosphère de Titan
Ce satellite de Saturne possède une atmosphère dense composée principalement d'azote et le méthane. La dissociation de ces deux espèces principales par des photons UV et des particules énergétiques produit un ensemble de molécules complexes et une couche d'aérosols globale. Titan est un satellite avec une météorologie vigoureuse, comportant de nombreux cycles encore mal définis, une surface présentant diverses structures (lits de rivières asséchés, dunes, cratères, lacs d'hyrdocarbures et peut-être des cryovolcans) et une photochimie bien plus riche que ce qui était prévu initialement.
L'étude de Titan est intéressante pour l'ensemble des processus en jeu (météorologie et climat, photochimie) mais aussi car il s'agit également d'un analogue de la terre primitive. En particulier la photochimie qui y prend place est de nature à produire des molécules prébiotiques et la brume photochimique omniprésente est de même nature que celle qui a protégé les basses couches de la Terre au debut de l'apparition de la vie.
En 2004, la mission Cassini-Huygens (NASA/ESA) est entrée dans le système de Saturne, et depuis, les instruments de l'orbiteur Cassini observent Saturne et ses satellites régulièrement. L'orbiteur passe aux abords de Titan une fois par mois en moyenne, et produit une grande quantité d'information. En 2005, Huygens est descendue dans l'atmosphère de Titan et a permis d'observer et de mesurer les propriétés atmosphériques de l'intérieur, produisant ainsi un jeu de mesure in situ unique. La compréhension du système climatique de Titan passe par l'analyse de ces observations. Au GSMA, nous analysons divers types d'observations photométriques pour caractériser les couches d'aérosols et de nuages.
Notre intérêt se porte, d'une part, sur la brume stratosphérique et troposphérique ainsi que la couche nuageuse pour ensuite caractériser le système climatique et, d'autre part, sur la brume de haute altitude et la connexion entre les processus chimiques et les aérosols. La partie la plus importante du travail consiste à développer des modèles de définition des propriétés atmosphériques puis, en utilisant des modèles de transfert radiatif (SHDOMPP, SPSDISORT,...), à modéliser l'interaction entre la lumière solaire et la planète dans différentes géométries.
L’atmosphère de Titan est un environnement à basse température, siège d’une chimie organique complexe. Le dépôt d’énergie apporté, dans cette atmosphère, par les photons solaires, les électrons de la magnétosphère de Saturne et les rayons cosmiques brisent les principaux constituants de l’atmosphère, à savoir N2 et CH4, ouvrant la voie à la formation de molécules organiques complexes. Un riche inventaire moléculaire a été détecté, par l’instrument INMS qui se trouvait à bord de la sonde Cassini. Des ions lourds ont été recensés, ce qui suggère clairement que de nombreux mécanismes de croissance moléculaire sont à l’œuvre. Les macromolécules engendrent des embryons d'aérosols qui eux aussi vont croître via des processus physiques propres.
Les aérosols produits sédimentent lentement vers le sol et interagissent fortement avec la lumière traversant l'atmosphère. Ils influencent donc, de façon directe ou indirecte, la structure thermique de l'atmosphère de Titan ainsi que la photochimie qui s'y produit. Enfin, en pénétrant dans les couches basses, ils servent de noyau de condensation pour produire la couche nuageuse. Les modèles de microphysiques sont donc également utilisés pour prédire l'évolution de la couche de brume et des nuages, soit en modélisation 1D ou doit dans le cadre de modèle de climat globaux (tel que le GCM de l'IPSL).
Une extension aux atmosphères de certaines exoplanètes et de Pluton, fait également partie de ce travail. Nous orientons nos activités suivant quatre axes : le premier concerne les propriétés radiatives des atmosphères planétaires, avec une application à Titan, Pluton et à quelques exoplanètes ; le second traite de la complexité chimique dans les atmosphères ; le troisième axe a pour objet d'étude la surface de Titan, avec une attention particulière pour les océans d'hydrocarbures. Le quatrième axe concerne l'atmosphère terrestre, et plus particulièrement le transport d'eau vers la stratosphère, pour laquelle un modèle numérique méso-échelle est mis en œuvre et permet l'interprétation des mesures in situ réalisées dans une autre thématique de l'équipe.
L’atmosphère de Titan est un environnement à basse température, siège d’une chimie organique complexe. Le dépôt d’énergie apporté, dans cette atmosphère, par les photons solaires, les électrons de la magnétosphère de Saturne et les rayons cosmiques brisent les principaux constituants de l’atmosphère, à savoir N2 et CH4, ouvrant la voie à la formation de molécules organiques complexes. Un riche inventaire moléculaire a été détecté, par l’instrument INMS qui se trouvait à bord de la sonde Cassini. Des ions lourds ont été recensés, ce qui suggère clairement que de nombreux mécanismes de croissance moléculaire sont à l’œuvre. Les macromolécules engendrent des embryons d'aérosols qui eux aussi vont croître via des processus physiques propres. Les aérosols produits sédimentent lentement vers le sol et interagissent fortement avec la lumière traversant l'atmosphère. Ils influencent donc, de façon directe ou indirecte, la structure thermique de l'atmosphère de Titan ainsi que la photochimie qui s'y produit.
Vue d'artiste d'une occultation par Titan, acquise par la sonde Cassini.
Afin de caractériser les propriétés de ces aérosols à haute altitude, on a la possibilité d’utiliser la banque de mesures héritées des acquisitions faites par deux instruments à bord de Cassini : l'Ultra VIolet Spectrometer (UVIS) et l'Imaging Science Subsystem (ISS). En effet, ce sont les seuls instruments ayant permis de sonder la haute atmosphère de Titan. Les observations d'UVIS, en mode occultation, fournissent des informations sur l'extinction totale produite par les aérosols. Pour une taille d'aérosol fixée, on peut déterminer la densité volumique de particules, tandis que l'observation de l'«airglow1» permet de contraindre la taille et la densité volumique de particules jusqu'à une altitude de ~800 km.
Dans le cas de l'instrument ISS, les images obtenues permettent de caractériser les propriétés de diffusion des particules dans différentes configurations optiques, ceci jusqu'à ~550 km d'altitude. Cela a permis, par exemple, un suivi complet de la couche détachée au cours des 13 ans de la mission Cassini. Cette exploitation des données de la sonde Cassini est complétée par une modélisation numérique des processus photochimiques, ainsi que par des simulations en laboratoire. En joignant ces différentes approches complémentaires, on pourra in fine dessiner un schéma global de production des aérosols comprenant les mécanismes majeurs de la conversion gaz-particules.
Pour notre étude concernant la croissance des aérosols de Titan, les récentes occultations solaires acquises par un autre instrument qui était à bord de Cassini : VIMS, révèlent une forte absorption vers 3.4 microns. Jusqu'à présent, les propriétés spectrales des molécules détectées dans l'atmosphère ne peuvent pas expliquer cette absorption. Nous explorerons actuellement la possibilité d'une absorption liée à la présence de molécules d'hydrocarbures polycycliques (HAP ou en anglais « PAH »). En effet, les molécules de cette famille présentent de nombreuses raies d'absorption aux environs de 3.4 microns, ceci en raison de leur richesse en liaisons C-H. De plus, ce genre d'espèces chimiques sont suspectées d'être le chaînon manquant entre les molécules simples, particulièrement le benzène, initialement produites par la photochimie et les aérosols organiques.
Enfin, les observations de VIMS et d'ISS permettent aussi de caractériser la brume et les opacités des gaz, méthane et espèces mineures. Les différents instruments observent des longueurs d'onde différentes, permettant d'acceéder à des couches différentes de l'atmosphère. L'objectif de ces études est multiple : un premier objectif est de cartographier l'opacité de la brume et des nuages, et retrouver les propriétés quantitatives de ces deux composantes (variations spatiales des opacités, comportements spectraux, taille des particules, etc...). Avec une bonne compréhension des opacités de l'atmosphère, et en particulier l'opacité des gaz, on peut aussi cartographier la surface assez finement dans plusieurs fenêtres. Ces observations ont déjà permis de caractériser les indices optiques des aérosols, la transparence de l'atmosphère dans divers fenêtres. Cela permet ensuite d'utiliser ce type de modèles pour retrouver les albédos de surface dans différentes régions d'intérêt.
Avec la Terre, Titan est le seul corps du système solaire disposant de mers, lacs et dépressions lacustres. Ces formations sont soit remplies de liquide, soit vides. Bien que le liquide devrait avoir, en première approximation, une composition faite d'un mélange ternaire de méthane, d'éthane et de diazote, les propriétés exotiques de ces systèmes lacustres ou maritimes sont encore largement méconnues. Des épisodes de surbrillance RADAR ont été, par exemple, détectés à la surface de la mer Ligeia Mare par la sonde CASSINI. Une interprétation a été donnée récemment par notre équipe. Ce scénario repose sur un mécanisme de déstabilisation du mélange ternaire à relativement haute pression. Maintenant se pose la question de la nucléation et de la croissance des bulles de diazote potentiellement produite lors de cette déstabilisation. Nos travaux s’attacheront à apporter une réponse à cette question.
Le RADAR de Cassini a également mis en évidence une autre curiosité des mers de Titan : leur surface apparaît étonnement lisse. Plusieurs hypothèses ont été avancée pour rendre compte de cet aspect. Cependant, à ce jour, aucune n’a été appuyée par un modèle physique solide. Nous allons développer plusieurs idées dans ce contexte. Finalement, nous cherchons à combiner l'analyse de clichés VIMS et modèles thermodynamiques afin de contraindre la composition de zones d'intérêt comme les mers, les dépôts évaporitiques, ou les reliefs d'origine karstique.