Etude des processus stratosphériques

Contexte historique

La vapeur d'eau est le gaz à effet de serre dominant dans l'atmosphère terrestre. La tendance en vapeur d'eau dans la stratosphère est un sujet d'intérêt majeur étant donné son influence sur la couche d'ozone et le climat (Shindell et al., 1998; Herman et al., 2002; Loewenstein et al., 2002). Les modèles climatiques montrent qu’une augmentation de l’humidité stratosphérique peut conduire à un réchauffement de la surface du globe ainsi qu’une destruction d’ozone plus importante pendant l'hiver polaire (Shindell, 2001; Dvortsov and Solomon, 2001). En particulier, le climat à la surface est extrêmement sensible aux variations de vapeur d’eau qui ont lieu autour de la tropopause.

La quantité d’eau qui rentre dans la stratosphère est en premier lieu imposée par les températures les plus froides rencontrées par les masses d’air lors de leur ascension lente de la haute troposphère vers la basse troposphère des régions intertropicales. Ces températures sont régulièrement propices à la saturation par rapport à la glace : les cristaux ainsi formés sédimentent et assèchent l’air qui rentre dans la stratosphère. On parle de piège froid (Gettleman et al., 2001). De par leur impact sur la température, d’autres phénomènes sont reconnus pour influencer la quantité de vapeur d’eau autour de la tropopause.Les principaux sont l’oscillation quasi-biennale (QBO) (Giorgetta and Bengtsson, 1999; Geller et al., 2002; Randel et al., 2000; Fueglistaler and Haynes, 2005), les variations interannuelles de l’intensité de la circulation de Brewer-Dobson (BDC) (Randel et al., 2006; Dhomse et al., 2008), la température et la hauteur de la tropopause, ainsi que les ondes générées par la convection profonde.Un autre processus potentiellement important qui joue plutôt un rôle d’humidification de la stratosphère est les pénétrations convectives qui peuvent atteindre la basse stratosphère qui sont appelées overshoots stratosphériques. Ces processus rapides injectent de la glace qui sublime avant de retomber en partie dans la troposphère (Liu et al., 2010a; Dauhut et al., 2015, Behera et al., 2022)., ainsi que d'autres composés, directement dans la basse stratosphère.

Bien que la tendance en vapeur d'eau sur le long terme dans la moyenne stratosphère ait été estimée à 0.6%/an (Scherer et al., 2008), on observe sur des périodes variant de 5 à 10 ans des chutes rapides de concentration suivies de périodes où la concentration retrouve sa valeur d'origine. Pour des niveaux de pression supérieurs, plus proche de la tropopause, le caractère hautement variable dans le temps de la hauteur de la tropopause et de l’abondance en vapeur d’eau dans la haute troposphère et basse stratosphère (UTLS) compliquent considérablement l’estimation d’une tendance proche de la tropopause. Pour finir, il ressort de toutes les études publiées que la tendance observée pourrait être étroitement liée au changement climatique. Il a été démontré que de petits changements dans la quantité de vapeur d’eau dans la basse stratosphère pouvait induire des changements notables dans le bilan radiatif global et sur la température de surface (Solomon et al., 2010; Randel and Jensen, 2013). Il est aujourd'hui constaté que l’augmentation de vapeur d’eau observée sur le long terme ne peut être complètement expliquée par le changement de la température de la tropopause – celle-ci a diminué alors que la quantité de vapeur d’eau a augmenté - ou l’augmentation de la quantité de méthane. Il subsiste aujourd’hui de nombreuses incertitudes quant aux mécanismes physiques, dynamiques ou chimiques prenant place dans la TTL et qui gouvernent à la fois la tendance en vapeur d’eau stratosphérique et la répartition des gaz à effet de serre.

Depuis les années 2000, notre équipe participe à l'effort de recherche autour de l'étude des processus d'échange entre la haute troposphère et la basse stratosphère, en particulier en ce qui concerne la vapeur d'eau. Nos études reposent en grande partie sur l'analyse des mesures insitu obtenues à partir des spectromètres à diode laser de la famille Pico-SDLA, couplées à des observations complémentaires issues de moyens satellitaires ou d'autres instrumentations. L’analyse repose sur des outils de modélisation, en particulier des modèles atmosphériques tridimensionnelles de type méso-échelle.

Les objectifs scientifiques de nos travaux sont :

  • L’étude des processus de régulation de la vapeur d’eau stratosphérique et sa variabilité : convection profonde tropicale ou overshoots (e.g. campagnes SCOUT-AMMA, TRO-pico), ondes atmosphériques (campagne Stratéole-2), transports horizontaux, circulation de de Brewer-Dobson ...
  • L'étude de la composition/la chimie de l'UT-LS (e.g. campagnes HIBISCUS,SCOUT-AMMA, ENRICHED)
  • L'amélioration de l'état de l'art instrumental pour l'observation de variables climatiques essentielles (ECVs).