Vieillissement naturel en milieu urbain des pierres calcaires hydrofugées : évaluation de la durabilité des traitements et de leur impact sur le nettoyage.
Résumé
Notre étude concerne le vieillissement en milieu naturel de pierres calcaires traitées par des produits hydrofuges, selon deux modes d’exposition (exposées aux pluies ou abritées des pluies). L’interaction des multiples paramètres (4 produits hydrofuges, 8 lithotypes, 5 sites d’exposition) permet d’évaluer les facteurs influant sur la durabilité des traitements. L’intérêt de la recherche présentée ici est double. Tout d’abord, cette étude est l’une des rares à avoir abordé le vieillissement à moyen terme (10 ans) de pierres traitées par des produits hydrofuges. La deuxième originalité réside dans le fait qu’elle envisage non seulement le vieillissement des pierres exposées aux pluies, mais aussi celui des pierres abritées. En effet, lors de l’hydrofugation d’une façade ou d’une statue, certaines parties sont protégées de la pluie et ne sont donc pas lessivées. Le traitement limite-t-il l’encrassement ou l’accélère-t-il ? Permet-il de faciliter le nettoyage ? Ces deux cas d’exposition sont pris en compte pour évaluer la durée de vie des traitements et identifier leurs principaux facteurs d’altération, suivant leur positionnement sur le monument.
Après le traitement, les éprouvettes de calcaire ont été exposées à l'environnement extérieur sur des périodes variant de 1 à 10 ans. Les éprouvettes ont été exposées dans différentes situations: à la pluie sur les parties hautes de cathédrales françaises et à l'abri de la pluie sous un abri conçu spécifiquement. Lors de l’exposition aux pluies, le vieillissement naturel des pierres calcaires et des produits est évalué par le biais de mesures effectuées en laboratoire. Dans un premier temps, la colorimétrie permet de souligner la colonisation par des micro-organismes et, dans une moindre mesure, l'état d'altération de la surface de la pierre. Ensuite, la perte de poids révèle l'importance des phénomènes de dissolution de la pierre calcaire et donne des informations sur l'efficacité des produits hydrofuges. Enfin, les propriétés hydrofuges des traitements sont évaluées après exposition par le test à la microgoutte et le test d’imbibition capillaire.
La dernière partie est consacrée à l’étude des pierres traitées et exposées, mais à l’abri des pluies. L’encrassement et la sulfatation de ces échantillons sont quantifiés. On observe que les traitements hydrofuges à base de silicone n'ont pas empêché l'encrassement des pierres calcaires, ni la sulfatation, qui varie de manière significative en fonction du site d'exposition et du type de pierres. De plus, une perte d’hydrophobicité à la surface des échantillons a été observée avec l'augmentation du temps d'exposition. Ces mesures sont ensuite suivies par des essais de nettoyage des surfaces altérées selon deux techniques couramment utilisées pour la restauration des monuments et des oeuvres d’art : le microsablage et le laser. L'efficacité du nettoyage a été vérifiée par une inspection visuelle et des mesures de couleur et l'hydrophobicité à la surface des éprouvettes nettoyées a été déterminée par le test à la microgoutte.
Les produits hydrofuges montrent un comportement déterminé en fonction de l'environnement, mais surtout selon le type de pierre. En effet, dans certains cas, la perte de l’effet hydrofuge est observée, même après une courte période d'exposition. Ces résultats devraient permettre d’aider les restaurateurs, entreprises de restauration et maîtres d’oeuvre, dans le choix du produit de protection le plus adapté en tenant compte des lithotypes et des conditions environnementales (climat, nature des polluants et situation architecturale), et également d’informer sur la nécessité de re-traiter les monuments après une période à déterminer.
Mots-clés : Produits hydrofuges, Pierres calcaires, Environnement naturel, Pollution, Durabilité, Encrassement, Nettoyage.
Abstract
The aim of this research is to assess the durability of water-repellents applied on different types of limestone. It evaluates the combined impact of urban atmospheric pollution, climate and the stone types on the water-repellent efficiency, allowing a better understanding of the durability of the treatments.
Limestones with different petrophysical properties were treated with four types of water repellent treatments: an acrylic resin containing Teflon, a polysiloxane in solvent, a silicon resin and a microemulsion of polysiloxanes. After treatment, the limestone tablets were exposed to outdoor environment during periods varying from 1 to 10 years. Limestones were exposed in different situations: to the rain, on upper parts of French cathedrals, and sheltered from the rain, under specifically designed shelters.
The natural ageing of limestones and products exposed to rain is assessed through measurements carried out in laboratory. At first, colour measurements show the colonisation by microorganisms and, to a minor extent, the weathering state of the stone’s surface. Then, the weight loss reveals the importance of the dissolution phenomena of the stone and gives information about the efficiency of the water repellents. Eventually, the water-repellency of the treated stones, after exposure, is studied more closely by micro-drop absorption and capillary water absorption tests.
Measurement of colour, mass and microdrop absorption time were performed on tablets before and after exposure sheltered from rain. Water-repellent treatments did not prevent limestone from soiling and a loss of the surface hydrophobicity was observed with increasing exposure times. Sulphation significantly varies in dependence on the exposure sites and limestone types. After the preceding measurements, the tablets were partially cleaned by microsandblasting (Corindon powder, 30 μm, air pressure 1 bar) and laser (Q-switched Nd-YAG, pulse duration 20 ns, fluence 1 J.cm-2). The efficiency of the cleaning was checked by visual inspection and colour measurements and the waterrepellence of the cleaned surfaces was determined by microdrop tests.
The water repellents show specific behaviour according to the environment but especially according to the stone type. Indeed, in some case, no remaining of treatment’s water-repellency is noticed, even after a short period of exposure. These results may help in the choice of the most adapted product in a given situation, but also inform about the necessity of re-treating monuments after a period of time.
Key words: Water-repellent, Limestone, Natural ageing, Pollution, Durability, Soiling, Cleaning.