Programme PUCA "Temporalités du projet urbain"

Portage et direction du projet : EA 2076 Habiter

En tant que "développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins" (Rapport Brundtland, 1987), le développement durable est, en première intention, une notion par essence temporelle. Elle invite à reconsidérer la course au progrès dans laquelle les sociétés modernes sont plongées et propose de repenser quelques projections (ex : techniques) au contact d’incertitudes croissantes (ex : soutenabilité écologique des modèles de développement).

Mais, dans cette marche à construire, il convient aussi de (re)penser le présent (Puech, 2010) : la question de l'entrecroisement des temporalités est donc centrale. Or, les temporalités ne sont pas forcément convergentes. Les perspectives à long terme ne reflètent pas toujours les intérêts à court et moyen termes. Des conflits d’enjeux peuvent naître et des arbitrages sont alors nécessaires dans les décisions à prendre dans et pour l'immédiat.

La ville est un milieu de confrontation de temporalités diverses, aux nombreux potentiels de conflits. Surtout, les sociétés urbaines vivent une accélération du temps (Rosa, 2010), sous l'effet, en particulier, de la mondialisation de l'économie et du développement des technologies. Non seulement la ville doit alors être aménagée pour répondre à ces exigences de vitesse, de connectivité, de fluidité, mais la production même de la ville se doit d'être de plus en plus réactive. Celle-ci doit répondre à des impératifs de rentabilité économique, s'accorder avec des calendriers politiques changeants et l'agenda des mandats électifs, et satisfaire les besoins des habitants dans leur quotidienneté.

En outre, les productions urbaines s'inscrivent dans un contexte de dérèglement climatique et de transition énergétique qui nécessite de transformer les façons d'aménager, par delà le simple recyclage des politiques environnementales qui a globalement constitué la première génération des politiques mues par le développement durable (Theys, du Tertre et Rauschemayer, 2010) ou encore par delà la transformation de quelques politiques locales sous l’égide de la construction écologique (Hamman - coord., 2009) ou encore de l’urbanisme de dispositifs (Ascher, 2004). De telles productions cheminent à ce jour vers un référentiel cognitif de l’adaptation et un registre de l’anticipation comme justification en gestation (Faburel et Roché, 2011), d’un nombre croissant d’orientations programmatiques (ex : Facteur 4).

Un tel contexte réinterroge tant les justifications que surtout les pratiques traditionnelles de l'urbanisme, de ses métiers et savoir-faire. Il amène à penser autrement le processus de fabrique de la ville et l'aménagement des spatialités, qui semble de plus en plus indissociable de celle des temporalités.

L'un des enjeux actuels de l'urbanisme est ainsi de penser, de façon explicite, volontaire et dans une approche globale, la diversité des temps de la ville. Aborder la question du projet urbain durable sous une perspective temporelle doit permettre de repenser les liens entre les différentes dimensions du projet. Elle doit dépasser l'approche traditionnelle du temps, linéaire et homogène, qui freine la compréhension de la diversité temporelle du projet urbain. Cette perspective temporelle doit permettre de comprendre la multiplicité des temporalités inhérentes au projet urbain.