Septembre 2017 - Entretien sur les programmes exploratoires de recherche

Sandrine Bouquillon (ICMR)

Sandrine Bouquillon, professeure au sein de l’Institut de Chimie Moléculaire de Reims (UMR CNRS 7312) a effectué trois séjours de « découverte » en Finlande, République tchèque et Suède entre 2012 et 2015 et elle a accepté de revenir sur ces trois expériences.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours et vos thématiques de recherche ?

J’ai fait ma thèse à Toulouse dans le domaine de la chimie de coordination à visée thérapeutique, sur des complexes radioactifs pour l’imagerie médicale. J’ai poursuivi par un postdoctorat de 18 mois en Allemagne au Max Planck Institut für Kohlenforschung à Mülheim/Ruhr près de Düsseldorf où j’ai travaillé dans le domaine de la catalyse.

J’ai ensuite réalisé un poste d’ATER de 2 ans à Grenoble, pour finalement intégrer l’URCA en tant que maître de conférences en 1996 puis professeure en 2006. Mes recherches portent maintenant sur les agrosciences et la préparation chimique des dérivés de la biomasse dans le secteur des tensioactifs, des dendrimères et des liquides ioniques pour des applications environnementales et cosmétiques.

Dans quels pays êtes-vous allée et avec quels programmes ?

J’ai eu la chance de pouvoir partir dans trois pays différents et avec trois programmes différents : en 2012 en Finlande dans le cadre du programme Sampo, en 2013 en République tchèque avec le programme Vltava et enfin en 2015 en Suède grâce au programme Tor. Dans les trois cas, j’avais reçu des informations par mail, je ne connaissais pas ces programmes avant mais la possibilité de rencontrer de nouvelles équipes dans ces pays m’intéressait.

Pouvez-vous nous parler de ces séjours ? (Vos programmes, activités, etc.)

Je suis partie la première fois pour séjour de 5 jours en Finlande en 2012. Je n’étais jamais partie dans ce pays et je n’y avais pas de contact avant mon départ, j’ai simplement postulé à un appel à l’automne 2011 et j’ai su en janvier que j’avais obtenu une subvention.

Le dossier de candidature est assez concis mais il faut fournir deux lettres de recommandations. J’ai donc commencé par chercher s’il y avait des équipes dans ma thématique et c’est l’attaché de coopération scientifique de l’Institut français en Finlande qui s’est occupé de prendre contact avec les laboratoires que j’avais identifiés et qui a organisé le circuit que j’allais faire.

Par contre, une fois que l’on a le circuit, c’est à nous de faire toutes les réservations de vols, trains et hôtels. Nous ne sommes pas accompagnés sur place et il y a donc une certaine liberté.

Je suis arrivée le dimanche soir à Helsinki et je suis partie le lundi matin pour Turku, au Sud-Ouest du pays. J’ai rencontré des équipes dans les deux universités de la ville, l’Université de Turku et son pendant suédophone, l’Abo Akademi. Le soir je suis rentrée à Helsinki et le mardi, j’avais rendez-vous avec des chercheurs de l’Université d’Helsinki. Le mercredi il fallait que je me rende à Jyväskylä, dans le centre de la Finlande, où j’étais attendue pour passer la journée du jeudi et je suis retournée une fois de plus à Helsinki. Le vendredi je me suis rendue en avion à Oulu, à quelques kilomètres du cercle polaire. Ça a été une semaine très intense.

En 2013, j’ai vu passer un appel pour le même type de programme mais en République tchèque, j’ai donc à nouveau postulé et obtenu une bourse.

Cette fois ma mobilité a été plus courte puisque je suis arrivée le dimanche et je suis repartie le jeudi. J’ai rencontré des équipes de l’Université de chimie et de Technologie de Prague le lundi. Cette université dispose d’installations très impressionnantes, très différentes de l’Université Charles de Prague, où je suis allée le mardi. Celle-ci est en effet installée dans des bâtiments historiques qui feraient plus penser à la Sorbonne. Le mercredi je me suis rendue sur un autre site de l’Université Charles, à Hradec Králové, près de la frontière polonaise. Là-bas j’ai pu rencontrer des chercheurs qui travaillent dans la chimie pour le secteur cosmétique. Le jeudi, il était prévu que j’aille à l’Université de Brno mais les personnes du laboratoire d’accueil qui devaient me recevoir ont annulé la veille pour raisons personnelles, je suis donc rentrée en France le jeudi.

J’ai beaucoup apprécié l’accueil qui a été très chaleureux dans ce pays.

Enfin, pour mon troisième séjour de découverte, je suis partie en Suède car j’avais déjà des contacts à l’Université de Lund, dans le sud du pays. J’y suis donc allée depuis Copenhague, où mon vol atterrissait. Après avoir passé le lundi à Lund, je suis partie pour Stockholm le mardi pour rencontrer mes homologues de l’Université de Stockholm le mercredi. Je suis repartie le jeudi.

Dans les trois cas, il faut fournir un court rapport au retour de la mobilité ainsi que toutes les notes de frais, qu’il faut bien penser à conserver pendant la semaine. Le remboursement se fait à hauteur de 1500 euros maxi pour la semaine tout compris. On ne rentre donc pas tout à fait dans nos frais pour ce type de mission.

Quelles conclusions tirez-vous de ces mobilités ? Y a-t-il eu des suites ?

Je trouve ces dispositifs très intéressants et je repartirai sans hésiter. Ces trois mobilités m’ont permis de rencontrer des chercheurs avec lesquels je suis toujours en contact.

À Turku, je collabore fréquemment avec Pia Damlin d’Abo Akademi, qui est venue à Reims dans le cadre d’un programme équivalent à Sampo pour les chercheurs finlandais. Nous avons déjà publié un article ensemble et un deuxième est en préparation. J’ai également été invitée à donner des séminaires à l’occasion d’une rentrée doctorale d’Abo Akamedi. Je suis toujours en contact avec des chercheurs à Helsinki même si nous n’avons pas encore collaboré sur un projet en particulier ; un projet COST (resoumission) les faisant intervenir est en cours de montage.

Après ma visite en République tchèque, j’ai gardé contact avec les équipes de chimie de Hradec Králové dont Milan Pour, avec qui nous avons fait deux publications.

Il en va de même pour mon homologue de l’Université de Lund, nos thématiques étant complémentaires, nous nous consultons régulièrement en collaboration avec mes collègues de Gembloux AgroBiotech avec qui je travaille depuis des années.

Les trois équipes mentionnées (Abo, Université Charles et Lund) faisaient d’ailleurs partie de l’action COST que j’ai déposée en 2015.

Avez-vous des conseils à donner à des chercheurs qui souhaiteraient participer à ce type de programme ?

Tout d’abord, il ne faut pas s’attendre à faire du tourisme. Les programmes sont souvent très chargés : j’ai donné un à deux séminaires ou conférences dans chaque ville où je suis allée et pour chaque intervention, j’avais pris contact avec les équipes afin de savoir quelles thématiques les intéressaient en particulier. Il y a donc beaucoup de travail de préparation, auquel il faut rajouter l’organisation du voyage en lui-même, qui n’est pas de tout repos. Il ne faut pas s’attendre à être pris en charge sur place, il faut donc faire preuve d’autonomie.

Ensuite, il faut bien sûr être à l’aise en anglais, à la fois dans les aspects quotidiens du séjour que dans les séminaires et les rencontres avec les chercheurs. Au niveau financier, les trois subventions que j’ai obtenues étaient de l’ordre de 1 000 € à 1 500 € et bien souvent, elles ne permettaient pas de tout couvrir. Il faut également prévoir que la subvention n’est versée qu’après la mobilité, tous les frais doivent être avancés.

Mon dernier conseil serait de bien identifier les laboratoires que l’on souhaite visiter en amont, cela ne sert à rien d’en voir beaucoup si leurs thématiques sont trop éloignées des nôtres. De plus, les collaborations ne pourront se concrétiser que si l’on prend le temps de garder contact et d’entretenir des relations que l’on tisse.